J.O. 264 du 15 novembre 2006       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet
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Délibération n° 2006-100 du 27 avril 2006 portant avis sur un projet de décret relatif à l'allocation temporaire d'attente (saisine n° 06005779)


NOR : CNIX0609677X



La Commission nationale de l'Informatique et des Libertés,

Saisie pour avis le 7 avril 2006 par le ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement d'un projet de décret en Conseil d'Etat relatif à l'allocation temporaire d'attente ;

Vu la convention no 108 du 28 janvier 1981 du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel ;

Vu la directive no 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil en date du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données ;

Vu le code du travail, notamment ses articles L. 351-9 et suivants ;

Vu la loi no 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, modifiée par la loi no 2004-801 du 6 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel ;

Vu le décret no 2005-1309 du 20 octobre 2005 pris pour l'application de la loi no 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, modifiée par la loi no 2004-801 du 6 août 2004 ;

Après avoir entendu Mlle Anne Debet, commissaire, en son rapport, et Mme Pascale Compagnie, commissaire du Gouvernement, en ses observations,

Emet l'avis suivant :

Conformément à l'article 11 de la loi du 6 janvier 1978 modifiée, le ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement a saisi pour avis la commission d'un projet de décret pris pour l'application des articles L. 351-9 à L. 351-9-2 du code du travail.

Ces articles , issus de la loi de finances pour 2006, ont créé l'allocation temporaire d'attente, qui se substitue à l'allocation d'insertion, destinée à certaines catégories de personnes ne justifiant pas de références de travail, et majoritairement aux demandeurs d'asile. L'un des objectifs poursuivis est de mieux contrôler le respect des conditions d'attribution de l'aide, contrôle aujourd'hui limité du fait de la multiplicité des intervenants et de l'absence de système d'information homogène permettant la circulation des informations.

Le projet de décret confie aux Assédic la gestion des décisions d'ouverture, de suspension et de fermeture des droits à l'allocation temporaire d'attente. La loi a prévu que ces organismes reçoivent mensuellement les données nécessaires à la gestion des droits à allocation des demandeurs d'asile. Ces données sont relatives aux offres de prise en charge en centre d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA), aux refus d'hébergement en CADA exprimés par les demandeurs d'asile et à l'état d'avancement de la procédure d'examen des dossiers de demande d'asile (articles L. 351-9-1 et L. 351-9-2 du code du travail). Elles proviennent, d'après la loi, des « autorités compétentes de l'Etat » et de l'organisme gérant les demandes d'asile (l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides - OFPRA).

Pour la mise en oeuvre rapide du dispositif d'allocation temporaire d'attente, le ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement envisage de recourir aux outils informatiques utilisés dans le cadre de l'allocation d'insertion en y apportant certains aménagements, mais également à la mise en oeuvre de nouveaux traitements de données à caractère personnel.

Est ainsi envisagée la transmission de données de l'OFPRA vers l'Unedic de façon directe (via l'application TelemOFPRA permettant aux partenaires institutionnels de l'OFPRA habilités à consulter dans un cadre sécurisé les informations nécessaires à leurs missions portant sur l'état des procédures de demande d'asile) mais aussi indirecte (via l'application TAIPEI gérée par le ministère de l'emploi).

Sont également envisagées des transmissions de données personnelles des préfectures, en leur qualité de gestionnaires des ressortissants étrangers et de responsables du suivi de l'hébergement des demandeurs d'asile, vers l'Unedic.

Enfin, l'intervention de l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM) est envisagée afin de transmettre à l'Unedic les listes de personnes entrant en centre d'hébergement.

Sur ce dernier point, la commission observe que, si l'article L. 351-9-1 du code du travail n'identifie pas l'entité chargée de la transmission de ces listes, l'article R. 351-6-1 du projet de décret ne vise que « le préfet », ce qui conduirait à exclure toute possibilité d'intervention directe de l'ANAEM pour la transmission des listes de personnes hébergées en CADA. La commission estime par conséquent que la transmission directe par l'ANAEM à l'Unedic de la liste des personnes hébergées souffre, au regard du projet de décret présenté le 7 avril 2006, d'un défaut de fondement juridique.

La commission observe par ailleurs que le projet de décret ne comporte pas de description précise des données à caractère personnel appelées à figurer dans les listes nominatives transmises à l'Unedic. Elle demande que le décret renvoie à un arrêté d'application fixant la liste des données transmises par les partenaires du dispositif aux organismes gestionnaires de l'allocation temporaire d'attente.

La commission considère en outre que l'article R. 351-9-3 du projet de décret devrait être reformulé de la manière suivante afin de décrire plus précisément les conditions d'accès aux données de l'OFPRA :

« Pour procéder aux vérifications mentionnées aux articles R. 351-9-1 et R. 351-9-2, les organismes gestionnaires peuvent consulter, par voie électronique, les données à caractère personnel strictement nécessaires détenues par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides. Si les conditions d'ouverture des droits à l'allocation temporaire d'attente sont réunies, les organismes gestionnaires peuvent procéder à l'extraction de ces données et à leur enregistrement dans le système de gestion de l'allocation. Une mention de cette extraction est conservée par l'office afin de limiter aux seuls dossiers concernés la transmission ultérieure des informations nécessaires aux décisions de maintien ou de suspension des droits à l'allocation.

La sécurité des données est assurée lors de leur consultation, de leur extraction et de leur enregistrement. Elles sont notamment cryptées durant les phases de transfert. »

La commission observe enfin que l'article 4 du projet de décret concerne, comme l'article L. 351-9-4 du code du travail en prévoit le principe, la conclusion d'une convention de gestion entre les services de l'Etat concernés, l'OFPRA et les organismes gestionnaires. Cette convention est susceptible d'intéresser la protection des données personnelles par la définition des données échangées, de leurs conditions de conservation, des mesures de sécurité ou d'information des personnes. La commission prend acte de l'engagement de la direction de la population et des migrations du ministère de l'emploi à la saisir pour avis du projet de convention de gestion.



Le président,

A. Türk